Depuis l'île de Langkawi (Malaisie) où je me
trouve, je vous envoie plein de soleil, de sable blanc, d'eaux turquoises,
de corail riche et coloré, de tranquillité et de détente pour cette fin
d'année.
Je vous souhaite à tous une belle année 2010, avec
douceur, rire et joie de vivre pour vous et vos proches!
Après avoir quitté ma « chambre
d'hôte » horripilante à Melaka, j'ai pris un taxi pour la
gare routière. Ouf, ils acceptent de changer mon billet de vendredi
matin pour un départ le jour-même, c'est à dire le jeudi 26
novembre.
Le bus démarre à 8 heures. 5 heures
de route plus tard, nous voilà à Singapour. Après la
traditionnelle réunionite de tous les agents pour trouver mon pays
dans la liste officielle des relations diplomatiques, on me convoque
dans un bureau:
Les Marocains ont besoin d'un visa
pour Singapour.
Oui, je sais, c'est bien avec vous
que je dois voir ça, non?
Euh, pas vraiment. Vous n'êtes
pas au courant? On ne délivre plus de visa aux frontières! »
Puis elle se lève, sans rien dire,
disparaît derrière une porte, revient 15 minutes plus tard :
« Suivez-moi ».
À ce moment, je pensais qu'on me
trouverais une solution : j'ai un billet retour, une réservation
d'hôtel, mon titre de séjour français, une carte Visa Premier, les
tampons d'entrée et de sortie des pays précédemment visités,
bref, je respire tout sauf l'immigrée clandestine potentielle!
Je la suis, nous passons quelques
couloirs, descendons un escalier, et nous voilà sur un trottoir. Un
bus arrive, elle m'invite à monter dedans, en me disant, simplement
: « Malaysia », en me tendant mon passeport.
Je suis frappée par le caractère
expéditif du processus. Un papier blanc se trouve dans mon
passeport, expliquant les motifs de mon renvoi. Vexée, humiliée,
épuisée de ma nuit sans sommeil à lutter contre les bestiaux, j'ai
vu, au milieu de ce bus, et sans que ma pudeur ou ma volonté n'y
puissent rien faire, couler les premières chaudes larmes de mon
voyage.
Une fois du côté malaisien, je trouve
un Starbucks, et, très rapidement, sans doute elle aussi aidée par
mes fatigues physique et mentale, je suis envahie par l'angoisse du
« what's next? ». Je n'ai aucun plan B! Comme je l'ai dit
précédemment, c'est la période des vacances scolaires ici, et tout
est assez complet et cher! J'envoie un mail à « mon »
auberge à KL. Elle m'annonce qu'elle est complète, mais que je peux
débarquer, elle essayera de me trouver quelque chose pour moi dans
les autres maisons d'hôtes.
Mais le risque d'une seconde nuit sans
sommeil ou avec un sommeil précaire me pousse à essayer de trouver
une alternative.
Au bout de quelques heures, mon plan B
est improvisé : je prends le train de nuit avec couchette entre
Johor Bahru (la ville-frontière avec Singapour où je me trouve) et
KL. Le lendemain sera un jour nouveau!
Apaisée par ces quelques heures de
visibilité, je me lance dans la préparation de la suite de mon
voyage, pour ne pas me laisser abattre.
Allez hop! Réservation faite pour
Samedi 28 (après demain) : Phuket, Phi Phi, Lanta. J'ai fait ce
choix pour deux raisons :
Après ces deux galères
enchainées, j'ai besoin d'une pause tourisme bête et méchant;
En dehors de la Malaisie, j'ai le
droit d'aller, dans la Région, en Indonésie et en Thaïlande sans
visa; l'Indonésie étant en période de vacances scolaires comme la
Malaisie, et risquant de rencontrer les mêmes problèmes de place
et de prix, je me décide donc pour la Thaïlande.
Voilà, vol, hôtels, tout est booké.
J'ai la chance d'avoir le compartiment
de couchettes pour moi seule, je peux donc dormir tranquille, sans
même me soucier de la sécurité de mes bagages!
Les choses commencent à sembler mieux
se profiler pour moi enfin. Ce que j'ignorais, c'est que les
relations maroco-thaïlandaises en décideront autrement.
Samedi, aéroport de KL LCCT, comptoir
d'enregistrement T18 d'Air Asia. Nouveau rejet. J'ai en olus eu la
« chance », les deux fois, de tomber sur des nanas d'un
sadique admirable, d'un froid sibérien, complètement désolidarisées
de leur sexe, des pétasses réjouies de me prendre de haut, de
m'infliger la sentence qu'elles sont chargées de faire appliquer.
J'ai la présence d'esprit de faire
immédiatement changer mon vol, pour un départ jeudi 3 décembre,
même si, au fond, je me sens vaincue, abattue par ces 3 échecs
consécutifs, dénuée de toute faculté de résilience.
Re Starbucks, re mail à l'auberge.
J'ai également un échange de mails des plus perturbants avec le
consulat du Maroc à Paris, source de mes informations concernant
l'absence de visa pour la Thaïlande, qui campe sur ses positions, et
refuse de changer l'information sur leur site
(http://www.cgm-paris.fr/pages/prestations/visas.php)
En revanche, le consulat de la
Thaïlande à KL, lui, m'épate! Dossier déposé lundi matin, visa
retiré mardi après-midi, gratuit!
Je n'ai jamais compris à quoi servait
ce genre de visa :) J'ai juste eu à remplir un formulaire, et à
fournir une photo, aucun justificatif, aucun frais!
J'ai mercredi de libre, j'en profite
pour aller décompresser à Taman Negara, à l'entrée de la jungle,
la journée du mercredi.
Jeudi midi, j'ai enfin ma carte
d'embarquement pour Phuket : mes vacances sont à nouveau belles!
Après mon aventure cambodgienne,
j'étais de retour, le lundi 23, à Kuala Lumpur, cette fois pour y
passer 2 nuits, avant d'aller explorer le reste de la Malaisie
continentale. C'est aussi le jour où j'arrête de fumer, ce 23
novembre :)
À mon arrivée, je découvrai ce qui
pour moi restera le meilleur exemple de maison d'hôtes que je n'aie
vue jusqu'à présent, Europe, Asie et Maroc confondus.
Red Palm est en fait une maison sur 2
étages, avec un petit loft privatif sous les toits. Ce qui fait le
charme de cet endroit, c'est le fait que les propriétaires, Sofie et
Camel, deux jeunes malaisiens, sont très ouverts, très cultivés,
très à l'écoute des attentes et de l'environnement d'origine des
hôtes, non pas pour nécessairement s'adapter mais surtout pour
pouvoir mieux les diriger, leur faire comprendre comment les choses
fonctionnement localement, être diplomates en somme :)
La maison d'hôte est située dans le
Golden Triangle, la rencontre de China Town, de Little India, et de
KLCC (Kuala Lumpur City Center), le grand quartier commercial chic de
la capitale.
Lundi après-midi, je prends un ticket
pour le bus Hop on Hop off, au parcours vraiment complet, passant par
toutes les attractions de la ville et ses grands axes, restant ainsi
accessible même si on choisit de s'éloigner du parcours recommandé.
Premier stop : China Town. Le bus me
dépose sur Jalan Sultan, et je me retrouve très rapidement dans
Jalan Petaling, une rue super commerciale et où on peut trouver de
tout, pas cher : vêtements, chaussures, DVD piratés, bagages,
bijoux, montres, Hi-tech, des imitations de grandes marques, beaucoup
beaucoup de contrefaçons.
J'achète 2 Tshirts plus légers que
ceux que j'avais pris avec moi en partant de France, donc moins
chauds et plus rapides à sécher après lavages. Pour leur prix, je
peux les jeter avant de rentrer en France, pour ne pas être embêtée
par la douane. Il faut savoir qu'ici, c'est impossible d'échapper
aux contrefaçons. Les vêtements neutres, sans « marque »,
n'existent pas (enfin, sauf les vêtements traditionnels ou les
vêtements faits « maison », avec des coupes et des
motifs très... 60's :) ), et les gens me regardaient comme une
demeurée quand je demandais s'ils en avaient, avec un regard qui
disait : « pourquoi acheter du neutre quand tu peux avoir du
« Prada » ou du « Gucci » au même prix? »
J'ai ensuite voulu visiter le temple
indien de Sri Mahamariamman, à quelques rues d'ici, mais c'était
impossible en raison de travaux de restauration.
Je retourne à Jalan Sultan, et attends
le bus pour continuer mes visites. Un homme qui attendait le bus
entame la conversation avec moi, et se présente. Il s'appelle Pavel,
il est tchèque, il vit en Thaïlande, et il est à KL pour quelques
jours, pour renouveler son titre de séjour à l'ambassade
thaïlandaise de KL.
Nous passons l'après-midi ensemble.
Nous visitons les jardins des orchidées et des hibiscus, d'où on a
une jolie vue sur la ville.
Il avait pu obtenir, le matin-même, un
ticket pour se rendre sur le pont suspendu entre les tours Petronas.
Il n'est valable que pour une personne, et l'heure de validité est
passée de 15 minutes, mais nous décidons de tenter le coup. Bingo!
Comme c'est la dernière séance, on nous admet sans problème :)
Il m'invite à dîner, nous discutons,
il me donne sa carte, et m'invite à le contacter si je viens sur Koh
Lanta.
Le lendemain, mardi 24 novembre, je
m'en vais me promener dans Sentral Market (oui, avec un S :)), fais
quelques emplettes, fonce vers la gare de Puduraya, achète mon
billet pour Melaka le lendemain, et rentre à la maison d'hôtes pour
préparer ce qui deviendra le premier faux-pas de mon voyage. Avec du
recul, j'en souris, mais sur le moment, je n'avais pas trouvé ça si
drôle.
Je vous explique : ma décision d'aller
à Melaka ne se basait pas tellement sur l'envie de visiter la ville
elle-même, mais de la considérer comme port pour aborder en
direction de Pulau Upeh, une île dont une grosse partie est protégée
par WWF, pour accueillir les tortues de mer lors de la saison des
pontes; ce n'est actuellement pas la saison, mais quelques pontes
sporadiques ont lieu tout au long de l'année. Malheureusement,
j'avais beau fouiller le net, impossible de trouver des informations
concrètes sur comment s'y rendre ni sur l'unique hôtel sur place,
dont je n'ai ni le nom ni les coordonnées. Je me dis que je
trouverai bien sur place!
Après 3 heures de bus (c'est marrant,
le temps de transport passe plus vite quand on ne fume pas!),
j'arrive à la gare routière de la ville côtière. Je démarche les
taxis, pour me rendre sur le terminal de ferry/jetty, et je commence
déjà à voir venir le truc : la moitié ne savent pas où c'est, le
quart me dit qu'aucun speedboat ne m'emmènera là-bas, et le dernier
quart me demande ce que je peux bien vouloir faire là-bas! L'un
d'entre eux veut bien m'emmener là-bas, et je commence à déchanter
: personne ne sait comment s'y rendre, et un vieux m'assène le coup
de grâce : le seul hôtel de l'îlot a fermé il y a dix ans. Voilà,
tout simplement, mission avortée.
Après une première tentative dans un
hôtel dans les ruelles autour du port, comprends vite, comme ils
disent ici, que c'est un hôtel « pour Indonésiens », à
croire que la hiérarchisation de la dignité humaine est un concept
qui a traversé, traverse et traversera les âges et les frontières
: moquette dégueulasse, cafards, aucune fenêtres, des traces
bizarres sur les murs, étouffant, dégoûtant, impossible. Je prends
un taxi, et, après quelques visites toutes plus horrifiantes les
unes que les autres, je me rabats sur Shira GuestHouse, qui n'a pas
l'air aussi douteuse, est citée dans le Lonely Planet 2010, et en
plus dispose du net, ce qui me permet de préparer mes prochains
mouvements.
Seulement voilà : à peine installée,
et comme convoqués pour m'accueillir, des bataillons d'insectes
surgissent de toutes parts : moustiques, mouches, punaises rouges
(pour ceux qui ne savent pas ce que c'est, il s'agit en fait de
l'insecte le plus pervers que je n'aie jamais vu : la punaise rouge,
quand elle sent approcher la menace, devient en une fraction de
seconde super plate, et s'agrippe de toutes ces forces à la surface
sur laquelle elle se trouve; impossible de la virer d'un drap si on
n'arrive pas à être assez rapide pour qu'elle n'aie pas le temps de
s'aplatir!), etc, et certains sortent directement du matelas.
Il est tard, je ne trouverai rien
d'autre (vacances scolaires en Malaisie), je décide donc de prendre
mon mal en patience, mais, en revanche, d'écourter mon séjour à
dégoût-ville, et de dégager donc le lendemain. Je dois mon salut,
cette nuit-là, à Hnina, Morgane et à S., qui se sont relayés à
mes côtés toute la nuit pour pas que je craque, jusqu'à ce que
l'heure du premier bus pour Singapour soit presque là. Merci les
amis!
Ferry entre Phi Phi et Krabi,
Thaïlande, 9/12/09, 11h22 GMT+7
En arrivant à Siem Reap de Kuala
Lumpur, on respire tout de suite mieux, on sort de cette humidité
étouffante qu'on peut presque toucher dans la capitale malaisienne.
Après les formalités administratives,
on repère les 2 tuktuks que l'hôtel a envoyé pour nous.
J'attendais avec impatience la première
douche et une courte sieste. Mais le propriétaire de l'hôtel nous a
pris de court, et s'est tout de suite mis à nous expliquer comment
nous devrions procéder pour le tour des temples. C'est très gentil
mais... ça aurait pu attendre, on aurait été plus attentifs :)
Une fois tous les détails notés, je
prends une douche froide, et fonce vers un hamac que j'avais repéré
dans le jardin de l'hôtel.
Six heures de sommeil plus tard, Houda
me réveille. Je ne comprends pas que le hamac ne soit pas un lit
universel : c'est tellement confortable!
Nous sortons, dînons, papotons, et
allons nous coucher super tôt. Demain, debout à 3h du matin pour
aller voir le lever du soleil sur Angkor Wat.
Dur dur, mais à 4h30 nous sommes tous
les 5 (Houda, sa colloc Mathilde, Jannis et Sebastian, 2 allemands
qu'elles connaissent de Malaisie où elles sont en stage, et moi^^)
sur nos vélos, prêts à pédaler.
Nous arrivons juste à temps. Erich, le
propriétaire de l'hôtel, nous avait indiqué un spot inatteignable
en tuktuk, et qui nous a fait éviter les marées de 2000 à 3000
personnes qu'on trouve à d'autres endroits. Nous étions moins d'une
vingtaine là où il nous a envoyés. Top!
Nous reprenons nos vélos, et
continuons nos visites et nos explorations. Nous nous perdons un
moment dans une forêt très très encombrée, tellement que nous
devons couper des lianes et des toiles d'araignée pour pouvoir
passer. J'essaie de convaincre les garçons que ça laisser deviner
que personne n'était passé par ici depuis longtemps, et qu'il n'y a
donc probablement rien à voir. Ils ne m'écoutent pas. Au bout du
sentier, une rivière, et un cul de sac. J'avais raison!
Sans rentrer dans les détails, car en
3 jours de visites, les choses qu'on peut raconter peuvent être
assez redondantes, je dirai que j'ai retenu 3 choses de ce séjour à
Siem Reap:
Les Temples, sont d'une beauté
captivante, et chacun est vraiment radicalement différent des
autres! Quand je pense qu'il y a 20 ans encore, ils étaient en
plein démantèlement, vendus pierre par pierre aux enchères à des
collectionneurs, je suis vraiment contente que l'UNESCO se soit
mobilisé pour sauver le plus grand lieu de culte de l'Histoire de
l'Humanité! Je suis rassurée de voir que, contrairement aux idées
reçues, TOUTES les institutions ne font pas uniquement de la
figuration, et certaines jouent leur rôle de faire primer l'Homme
sur l'homme;
Oui, les Temples sont magnifiques,
mais la poule aux œufs d'or n'en pondra pas éternellement. Je
comprends bien que pour la population locale, les Temples
constituent une magne, une chance de s'extraire de la pauvreté et
de l'instabilité économique et financière. Mais si je suis, d'un
côté, complètement d'accord sur le fait que le tourisme joue un
rôle de levier pour aider à combler les fossé entre le Sud et le
Nord, il demeure néanmoins, de l'autre côté, cette sensation
d'être un porte-feuille sur pied, et qui est plus que désagréable!
Ici, le touriste est coincé dans une sorte de manège infernal (je
suis consciente du fait que mes remarques proviennent d'un cerveau
européanisé, mais si seulement on pouvait avoir accès au même
traitement que les locaux, je pense que je serais moins gênée par
ces petits détails):
Tout se paie en USD, avec le
billet de 1$ comme plus petite coupure; il est donc impossible de
payer quoi que ce soit en-dessous de ce prix-là.
En dehors du ticket d'accès aux
Temples, rien n'est contrôlé; tout le monde peut
s'auto-promouvoir guide, marchand de souvenirs, vendeur de
boissons, restaurateur, etc. Ça a son charme, certes, mais ça
vient avec quelques désagréments :)
Il y a des petits extras bien
cachés un peu partout : les ne sont jamais affichés, nous ne
pouvons donc pas savoir à quoi nous attendre, et l'offre initiale
se fait à la tête du client;
Je me demande jusqu'aujourd'hui
où les Cambodgiens font leurs courses, car je n'ai pas vu un seul
Local dans les boutiques ou les marchés où nous sommes allés; et
même si nous les avions trouvés, on ne nous aurait jamais fait
bénéficier du même prix : ici, les gens sont d'une solidarité
irréprochable les uns avec les autres. Aucun Cambodgien ne nous
dira combien il paye telle ou telle chose, et ils l'assument
pleinement, comme nous l'a si bien dit notre chauffeur de tuktuk à
qui on demandait combien il touchait la bouteille d'eau : « price
for me, price for you, not same same. ». J'ai trouvé plus
tard cet esprit (en version renforcée quand même) en Thaïlande
(en Malaisie, les prix sont transparents et les touristes et les
locaux consomment aux mêmes enseignes).
Ce que ça m'a fait plaisir de
voir ma cousine Houda ici! Un sentiment de fierté me gagne quand je
repense à ce petit bout de femme à l'aventure à l'autre bout du
Monde. Les parcours des études de mes cousin(e)s, pour ceux qui ont
voulu en faire, et en dehors du frère jumeau de Houda, exilé à
Pékin, sont d'un classique et d'un ennui à en pleurer; et voilà
que, celle que je percevais comme étant assez couvée par ses
parents et ses frères, a réussi à les toucher, en usant de ce je
ne sais quoi en elle, qui ne peut générer que de la confiance et
de la responsabilisation. Je suis fière d'être sa cousine! :)
Pour résumer, je dirais qu'il faut y
aller, tout simplement parce que c'est beau, et que c'est important
pour comprendre l'Histoire régionale. Mais munissez-vous, d'abord,
de pratiquement le même budget que vous dépenseriez pour un weekend
en Europe (je m'adresse aux voyageurs sac à dos :), pour moi 250USD
en 4 jours, et, ensuite, ne vous attendez surtout pas à découvrir
ici le vrai visage du Cambodge, car tout ici tourne autour des
Temples et du tourisme, et la mentalité locale est donc biaisée par
cette réalité!
Beaucoup de choses se sont passées
depuis la dernière fois, tellement de choses que je n'ai pas eu 2
minutes pour écrire!
Alors on s'était arrêté à Macao.
Lundi 16 décembre, première
exploration de HK. Je prends la navette, qui me dépose au Sheung Wan
Shun Tak Center.
Sac à dos bouclé, appareil photo
rechargé, chaussures lacées, je suis fin prête pour explorer la
ville!
Je redescends Connaught Road, pour
essayer de prendre l'Île le plus à l'ouest possible. Je remonte
Wing Lok Street, puis Bonham Strand. Je plonge dans Sheung Wan, le
vieux quartier commerçant de HK Island. Epices, poissons séchés,
fleurs, fruits, etc. Je comprends mieux le nom du territoire, Hong
Kong, le comptoir aux parfums.
Je discute quelques instants avec un
marchand de fruits à l'intersection de Bonham Strand et Hillier
Street. Il me file quelques tuyaux pour optimiser mes visites, je lui
promets de revenir le soir pour prendre des fruits.
Je remonte Hillier Str jusqu'à
l'intersection avec Queen's Rd, et, devant le spectacle des
grimpettes inévitables pour pouvoir continuer mes visites, je
rebrousse temporairement chemin, et décide de prendre des forces
avant d'attaquer.
Le marchand de fruits m'avait conseillé
la ruelle qui lie Hillier et Mercer Str, et où on trouve des petites
échoppes tellement ordinaires aux premiers abords, mais devant
lesquelles les gens faisaient la queue, ou venaient chercher leur
commande à emporter en costard-cravate (on est à peine à quelques
ruelles du Center, la City hong-kongaise). Ça ne peut être que bon!
Je me mets dans la queue. Étant seule, on me trouve immédiatement
une place.
À côté de moi; deux hommes, la
quarantaine, mangent rapidement. « Tourist? - Yes! »
Artur et Melvin travaillent à côté. Ils m'aident à décoder la
carte, intégralement en cantonnais. Allez hop, chicken congee. Je
sais juste que c'est du riz et du poulet.
À l'arrivée de mon plat, je suis un
peu surprise par son aspect, mais décide de ne pas m'en formaliser.
La purée de riz est vraiment très liquide, et le poulet gras;
quelques herbes flottent en surface.
Artur me conseille de mélanger avec la
moitié de ma soucoupe de sauce soja, en en gardant le reste pour
plonger dedans les morceaux de poulet que je trouvais au fur et à
mesure.
Pas trop mal à vrai dire. Par la
fenêtre, on voit s'épaissir la queue devant la boutique. Artur
finit sa soupe en vitesse, paye, et me salue : « This place is
so popular, we have to eat fast to let others enjoy! ». Il me
donne son numéro de téléphone et s'en va.
J'en fais de même quelques minutes
plus tard. L'estomac bien rempli mais pas lourd, je me sens en forme
pour entamer l'escalade du Mid Level.
Je remonte tranquillement Hillier Str,
mais m'aperçoit rapidement qu'il va falloir augmenter un peu la
cadence, non pas que j'aie besoin d'arriver plus vite, mais pour
m'éviter de rouler le long de la côte que je viens d'entamer :)
Je rejoins Hollywood Rd. Premier stop :
Man Mo Temple. Pour ceux qui se disent que ce nom leur dit quelque
chose, le temple a été utilisé comme scène de jeu dans Shenmue
II, Sur Dreamcast et Xbox.
Dans la réalité, c'est un temple
shintoïste qui rend hommage aux Dieux de la littérature (Man Tai),
de la guerre (Man Cheong), ainsi qu'à d'autres Dieux.
Ce qui m'a frappée essentiellement,
c'est la vitesse à laquelle les gens prient! Je n'ai jamais vu cela
dans aucun autre culte : ils s'arrêtent rapidement devant la statue
représentant une divinité, allument un bâton d'encens, joignent
leurs mains, balancent leur torse d'avant en arrière 4 à 5 fois, et
s'en vont.
Je ne sais pas si c'est la façon de
faire générale, ou si je suis tombée sur des mauvais élèves,
mais l'image que j'aurai retenue aura été celle-ci.
Je quitte le temple, contente d'avoir
une route plate devant moi. Je reprends donc Hollywood Rd vers l'est,
et cherche Aberdeen Str sur ma droite.
Aïe, aïe, aïe! J'ai parlé trop
vite. J'exagère (un peu...); mais la rue est presque verticale!
Je fume une petite clope, et me résigne
à affronter mon chemin de croix. Les locaux la grimpent en vitesse,
et se retournent pour me sourire après m'avoir dépassée. J'avais
envie de leur expliquer que je n'habitais pas Montmartre, mais à
quoi bon?
Miracle en milieu de route : le
trottoir est remplacé par un escalier! Mon réflexe est évidemment
de m'asseoir pour souffler et... fumer. Comme si je n'étais pas
assez essoufflée comme ça!
Arrivée au sommet de la rue, je prends
Castle Rd, à peine plus clémente, et débouche sur Robinson Rd;
enfin du plat!
Prochaine visite : la synagogue de HK
Island. Je la trouve là, belle, timide, cachée derrière de grands
barreaux. Un service de sécurité impressionnant : 2 vigiles, 1
scanner, 1 portique de détection de métaux, OK!
Je m'approche d'un des vigiles, et lui
demande si la synagogue est ouverte aux visites :
Are you Jewish?
I'm sorry, what??
Are you Jewish?
Don't you think it's a little
personnal? I haven't been asked that in the other places I wanted to
VISIT!
This is for Jewish people only.
So this is not open for visits,
only for prayers then.
You can visit without praying, but
you have to make an appointment with the rabbi, with at least a 2
days notice, so that he can make a prior research about you.
Euh... No, but thanks.
Je suis repartie de là furieuse!
J'admets pleinement que la communauté juive est plus sujette à une
certaine forme d'antipathie que la plupart des autres (mais elle
n'en a pas le monopole), de la part de personnes ou groupes ou
individus malveillants, c'est statistiquement incontestable. Mais ce
que j'ai vu, c'est de la parano aigue, d'autant plus que j'ai fait
comprendre que j'étais consciente du fait que certaines synas
n'étaient pas ouvertes aux touristes. Je n'ai d'ailleurs jamais eu
de problème à entrer aux autres.
Pour bien enfoncer le clou, le mec me
rattrape, m'interpelle, et ajoute : « Please, don't take any
pictures from the outside ». J'ai ravalé de justesse le « Go
F*ck yourself » que j'avais sur le bord de mes lèvres, et lui
rappelle que je suis dans la rue, libre de mes mouvements, et que sa
syna super secrète est dans tous les guides pour touristes! Dingue!
Bref, incident clos, passons à autre
chose, voulez-vous?
Je reprends Robinson Rd, et recherche
le Mid Level, l'escalator le plus long du Monde. Ça doit donner de
bonnes photos, avis appuyé la veille par mon conseiller privé ès
photographie.
Arrivée sur place, je me rends compte
que ça ne serait pas si évident que ça: l'escalator est surmonté
d'une bâche pare-soleil sur tout son parcours, ce qui empêche tout
perspective! De plus, un dénivelé trop important ne permet pas de
voir bien loin. Je laisse tomber.
Je lève les yeux, et là, ironie ou
pas, je tombe sur la mosquée de HK Island. Portail grand ouvert,
c'est l'heure de la prière. Je remonte mon écharpé sur mon duvet
^^, et m'introduis dans le jardin de l'établissement. Je prends
quelques photos. À la fin de la prière, le régisseur vient me
voir, et me propose d'entrer. On papote, il m'offre du thé. La
communauté ici est très variée : Ouighours ayant fui la Chine
continentale, Pakistanais et Afghans ayant échappé à la guerre,
Malaisiens et Indonésiens venus chercher une certaine prospérité
dans les 20 dernières années, et bien sûr expats de toutes
origines.
Je déteste prendre parti, et je sais
qu'il y a des communautés musulmanes où j'aurais été chassée
comme le diable, et des communautés juives où on m'a ouvert grand
les bras, mais dans l'irritation où j'étais avant d'entrer là, le
contraste était frappant.
En fait, cet homme était juste content
que quelqu'un les remarque et prenne 10 minutes de sa journée pour
voir comment se pratique l'Islam en Chine future; paisiblement, pour
le moment, je dirais.
Je suis repartie de là apaisée.
À la fin de Robinson Rd, se trouve le
parc zoologique et botanique de HK.
Je suis toujours mitigée quand je vais
dans ce genre d'endroits, partagée entre curiosité et tristesse.
À HK, je suis surtout venue chercher
le contraste. En effet, 5.6 ha de verdure et d'animaux, d'allées
entremêlées, ke tout avec un horizon de gratte-ciel (la Bank Of
China Tower, plus haute tour d'HK, n'est qu'à 3 rues d'ici), c'est
assez impressionnant. En sortant de là, j'avais à nouveau cette
sensation d'entrer dans le décor du Cinquième Élément.
Je quitte le zoo côté Upper Albert
Rd, et rejoins rapidement Garden Rd. En bas de l'avenue (ben oui,
fallait bien que ça redescende à un moment!), se trouve le terminus
bas du Peak Tram, le train historique qui permet d'atteindre le
sommet du Victoria Peak.
Je fais du coude à coude avec un
groupe de touristes japonais pour avoir une place. Ils n'en ont pas
l'air comme ça, mais ils peuvent être très agressifs par moments!
Une fois au sommet, je me dis que
j'aurais dû rentrer chez moi : il fait hyper froid, j'ai la
tremblotte, il y a du crachin, je suis trempée, il vente sur mon
crâne dénudé, et il y a un brouillard qui voile toute la baie.
Bref, impossible de faire une bonne photo!
Je reprends le bus public pour
redescendre au Center. Arrivée à destination, je remonte Queen's Rd
pour aller acheter mes fruits, comme promis. J'arrive à temps pour
la navette, et remonte à l'auberge.
Tout ce qui m'aurait fait plaisir après
cette longue et tout de même bénéfique journée de marche sous la
pluie, aurait été une bonne et longue douche chaude; ça ne sera
pas pour ce soir! L'auberge en limite la durée à 5 minutes :)
Bref, pour couper court, et devant les
mauvaises conditions de mon séjour à HK, et la détérioration
continue de la météo, j'ai décidé de passer mon mardi à
l'auberge à préparer le reste de mon voyage, et la moitié de mon
mercredi à l'aéroport à attendre mon vol pour la prochaine étape.
J'ai atterri à Kuala Lumpur (KL) dans
la nuit de mercredi à jeudi. Ma cousine Houda, en stage dans le nord
de la Malaisie, m'attendait à l'arrivée.
Ça fait plus d'un an qu'on ne s'est
pas vues! Elle est pliée en 4 en voyant ma tête :) Il est 1h30 du
matin; nous passons la nuit à l'aéroport; en attendant notre vol à
7h, destination Siem Reap, pour de nouvelles aventures!
* La précision de la description du
parcours, les ennuis que j'ai connus en Malaisie, ainsi qu'un certain
découragement à un moment, ont fait durer la rédaction de cet
article jusqu'au jour même de sa publication!
Bonjour à tous, Je viens donner des petites
nouvelles après ce long silence. Beaucoup d'entre vous m'ont
écrit des emails ou des messages sur FB, s'inquiétant de mon
silence ici, et je vous en remercie. Avant de reprendre les
épisodes qui sont passés mais pas encore contés ici (Hong-Kong,
Siem Reap, Kuala Lumpur, etc), je fais un petit point pour tous, y
compris ceux qui ne sont pas sur FB. La bonne nouvelle, c'est que
je vais très bien! :) La moins bonne nouvelle, c'est que mon
silence est du à une longue période de galères, dont je commence à
voir le bout.
Le blog n'est donc pas mort, et de nouveaux récits seront disponibles dès ce weekend, quand ma mini-misère sera définitivement derrière moi :)
Je voudrais vous remercier tous pour vos petits messages, et insister sur ceux qui étaient là dans les plus grands moments de doute, et qui m'ont aidée à ne pas laisser tomber, ce qui m'a honnêtement traversé l'esprit : Hnina, Morgane, Houda, Julien, et une personne très particulière, que je ne peux pas citer sans sa permission, pour des raisons qui lui sont propres :)
Pour vous situer politiquement parlant,
Macao a le même statut que Hong-Kong. Ce sont des S.A.R. (Special
Administrative Regions) : contrairement à ce que je pensais jusqu'il
y a pas si longtemps, et à la croyance générale d'ailleurs, ce ne
sont pas d'anciennes colonies, mais d'anciennes concessions; la Chine
les a louées au Portugal (Macao) et à la Grande-Bretagne
(Hong-Kong). Avant cela, le statut d'occupation n'était pas très
clair.
Macao avait été remise aux Portugais
en 1557, en remerciement pour avoir débarrassé la Mer de Chine de
la plupart de ses pirates.
Hong-Kong fur concédé progressivement
(d'abord Hong-Kong Island, puis Kowloon, et enfin les Nouveaux
Territoires (respectivement en 1840, 1859 et 1898, cette dernière
date étant également celle de la signature du bail de 99 ans entre
la Chine et la Grande-Bretagne). L'acquisition de ces terres s'est
faite au cours des Guerres de l'Opium, la Grande-Bretagne en
produisant en Inde, et le Pouvoir Central de Pékin en étant friand,
mais n'en ayant pas nécessairement les moyens, contraint donc de
céder des miettes de son territoire pour éponger ses dettes.
Voilà pour la petite parenthèse
historique. Revenons donc à Macao.
À mon arrivée, même scène avec le
passeport, sauf qu'ici on me renvoie vers le commissariat du port :
il faut un visa. Pas compliqué, ça prend 5 minutes, pas de photo,
100HKD (10€), un mois avec entrées multiples.
À ma sortie du terminal, je me rends
rapidement compte que l'ancienne cité lusophone est radicalement
différente de sa voisine. Je me fais tout de même aborder par les
conducteurs de pousse-pousse et les représentants des casinos, mais
sans insistance. Mes Converse et mon sac à dos ne doivent pas crier
« j'ai de l'argent à jeter par les fenêtres ».
Adossé au port, une sorte de village
fermé, flambant neuf : Fisherman's wharf.
C'est un village qui s'étend sur 33
ha, entièrement dédié aux casinos et au jeu. La corniche (ainsi
que le nom du village et le brouillard ce jour-là), rappellent San
Francisco; l'ambiance voulu est sans doute plutôt celle de Las
Vegas.
L'endroit est désert (pas étonnant à
9h15!), tant mieux, je vais pouvoir prendre des photos
tranquillement.
Après avoir fait le tour du quartier,
je me redirige vers le terminal de ferry.
Des dizaines d'hommes travaillent avec
beaucoup d'application des deux côtés de l'avenue : la semaine
prochaine (du 19 au 22 novembre), c'est le Grand Prix de Macao; on
fait donc revêtir à la ville ses apparats de fête.
Je trouve assez facilement la navette
pour la Macao Tower. Une vingtaine de minutes de parcours. Tout est
nickel ici; les routes sont ultra-propres, les trottoirs sont
immaculés, les arbres et espaces verts méticuleusement entretenus
par des travailleurs chinois, issus de l'immigration
post-rétrocession (1999 pour Macao, 1997 pour Hong-Kong). Pour
information, et au vu des flots de demandeurs d'emploi venant du Sud
de la Chine pour améliorer leurs conditions de vie et profiter des
richesses de la quatrième place financière mondiale, Hong-Kong a vu
son taux de chômage passer de 3% à 7% en quelques années, et a
donc décidé de limiter le nombre d'immigrés admis à 150 par jour.
À la Macao Tower, il y a 2 niveaux de
visites (le reste est occupé par cinémas, magasins, restaurants,
etc) : le 56ème étage, observatoire interne assez impressionnant,
puisqu'on marche sur des vitres, et que la vision du vide sous ses
pieds est assez... vertigineuse!
Là, je crois les Australiens de
Hong-Kong, rencontrés le matin-même au terminal de ferry. On
discute un peu, et ils m'informent qu'ils s'apprêtent à faire le
Bungee, au 61ème étage. Euh... Mazeltov? :) « You should do
it too, it's such an amazing experience! ». Bizarrement, je
n'ai pas dit non. Le trip me tentait bien je pense, et je n'ai pas eu
d'hésitation.
Mike saute en premier. Sa femme Davina
m'a détruit la paume de la main avec ses ongles en stressant. David
saute en second. Sa femme, qui a un joli prénom qui m'échappe,
s'est éloignée avec leur bébé, et a refusé de regarder. J'ai
sauté après eux. Personne pour stresser pour moi, et c'est tant
mieux; je suis trop réceptive au stress des autres, même si je suis
consciente de leur bon sentiment.
Allez hop! 3,2,1, Jump!
Après m'être remise de mes émotions,
je récupère photos et vidéos, et fonce vers le Macao historique.
Pour ça, et pour d'autres raisons que
j'évoquerai plus tard, je pense que mon divorce avec le Guide du
Routard va être prononcé et consommé! Ça fait un moment que je le
fais cocu avec Lonely Planet, mais là je pense que je vais
définitivement me mettre en ménage avec mon amant. Les plans
n'étant pas assez précis, j'ai du recourir au GPS humain pour
m'orienter. Pas évident de trouver quelqu'un qui parle anglais, ce
que je comprends, mais lorsqu'enfin j'en trouve, on m'explique que
personne ici ne connait les noms portugais des rues ou des sites
(alors qu'ils étaient indiqués dans cette langue sur le Routard!),
et ne pouvaient donc pas m'aider.
J'arrive difficilement, après 2 heures
de marche, au Largo do Senado, la place centrale du vieux Macao.
Ambiance d'une après-midi de dimanche
paisible et nonchalante: lèche-vitrines, badauds se promenant les
mains dans le dos, marchand de marrons pour annoncer l'installation
du foid, etc.
Dans mon dos, la Santa Casa de la
Misericordia, la plus ancienne œuvre de charité d'Asie; à mon
extrême droite, la poste centrale, bâtiment très ancré dans le
style portugais, comme j'ai pu l'admirer à Porto, plus loin,
toujours sur la droite, l'ancien parlement (ou palais du
gouvernement), et sur ma gauche, le Leal Senado, le Sénat Loyal,
dénommé ainsi pour avoir refusé de reconnaître le pouvoir
espagnol lors d'une tentative d'occupation au XVIIème siècle.
Mini choc : Le parlement est devenu un
McDo sur 4 étages, et le sénat un centre commercial. Aïe! Dur pour
moi de comprendre le classement au patrimoine de l'UNESCO. Je
m'enfonce un peu plus dans la place, et emprunte la Rua do Santos
Domingos (les noms chinois n'étant pas transcrits en alphabet latin,
je fais donc avec les moyens de bord...).
Je repère une petite échoppe où les
gens ont l'air de manger des trucs pas trop mauvais. J'entre. On me
regarde comme un Alien.
En fait, la plupart des touristes qui
viennent à Macao le font pour le jeu, et restent donc autour du
port. Alors un (e?:) touriste, ethniquement difficile à identifier
ici, crâne tondu, et l'air légèrement paumé, c'est pour le moins
déconcertant pour eux.
Je m'approche, et on pousse vers moi le
seul commis qui parle le strict minimum (et encore...) d'anglais.
J'essaie de me faire expliquer le menu, l'adolescent est mort de
rire, et est incapable de me dire de quelle viandes il s'agit pour
chaque plat.
Je prie pour que ce soit une viande
habituelle pour moi, et commande qui avait l'air bon sur une image du
menu. Les nouilles étaient excellentes, la viande avait un
arrière-goût un peu moisi; j'en ai quand même mangé 2 bouts par
politesse, car ils défilaient tous à ma table, les yeux pleins de
lumière, en me demandant : « good? ». Je ne sais
toujours pas ce que j'ai mangé, et je préfère honnêtement ne pas
savoir!
Je ressors de là à nouveau prête à
affronter le froid. Je retourne sur la place, et redescends
tranquillement l'Avenida de Almeida Ribeiro, puis l'Avenida do
Infante D. Henrique.
Au niveau du Casino Lisboa, je demande
à l'agente de la compagnie le numéro de bus pour regagner le
terminal du ferry (en fait, ici le concept de lignes et de plans de
réseau est très abstrait, les gens connaissent les lignes par cœur,
donc pas besoin de les afficher. C'est un peu comme au Maroc pour
ceux d'entre vous qui connaissent...)
La personne ne comprend pas. Je lui dis
« Hong Kong », « Ah, ah, this one! ». Je
monte dans le 33. D'un coup, je le vois traverser le pont de Taïpa
et Coloane. Je me dis qu'il fait peur-être un crochet...
Une heure de bus plus tard, terminus,
tout le monde descend. Le conducteur ne parle pas un mot d'anglais,
et me fait comprendre par des gestes assez énergiques qu'il faut
descendre. Il pointe du doigt le nom de la rue : Kwong Tung. Merde!
Ça ne ressemble pourtant pas tellement à Hong Kong!
Je me dis que lui tenir tête ne
servira à rien, et m'exécute.
À l'arrêt de bus, je vois un Blanc,
je m'approche, et l'entends parler anglais à un Chinois près de
lui. Yes!
Il m'explique qu'il attend le même
bus, et qu'il descend après le terminal ferry. On monte dans le bus.
Je lui pose des question de routine pour faire connaissance.
Il s'appelle Kyle, il a 24 ans, un
illuminé de l'Eglise de je-ne-sais-quel-saint-auto-proclamé.
Américain de Saint-Diégo, il m'explique qu'il était accro aux
drogues, « until the day Jesus talked to me ». Je veux
bien, pas de souci. La foi est quelque chose que je respecte
beaucoup, tant qu'on respecte son absence chez moi. Mais voilà, il a
fallu qu'il aille là-dedans... « you'd make an amazing
missionnaire, you know how to talk to people. ».Pour rappel, ça
fait 15 minutes qu'on se « connait », et il a parlé
largement plus que moi. Il me tend ensuite le petit prospectus (sans
offense pour aucun d'entre vous) de charlatans de ce genre de
mouvements. Je me dirige vers la sortie du bus, et il ne peut
d'empêcher de me lancer un dernier « Jesus hates the sin, but
he loves the sinner ». Pffff! Pauvre paumé va! Je hais le
prosélytisme à deux balles!
Avec tout ça, je suis juste à temps
pour mon ferry, et n'ai pas le temps de photographier Fisherman's
Wharf de nuit comme c'était prévu.
Je somnole tranquillement dans mon
siège, et repense à ce petit territoire d'à peine 26 km², et de
l'effet qu'il a eu sur moi.
En fait, je me rends compte, encore une
fois, que la vie en occident (et je pense que le fait que je vive au
pied de la Défense accentue cet effet) biaise notre vision des
choses, et déforme notre système de valeurs (c'est aussi pour ça
que je suis partie d'ailleurs, même si la France reste ma maison).
Mon premier réflexe, en me baladant
dans la ville, a été de me dire : « Il n'y a pas de grands
magasins de marques internationales, les gens s'habillent de fringues
Made in Tailor, donc la population est modeste, voire pauvre ».
Au secours les raccourcis!
Mais avec du recul, pas du tout. Zéro
mendicité, zéro « taxage » de clopes, les gens ont
l'air de manger à leur faim, d'être propres sur eux, et d'être
contents de leur vie, du moins aux premiers abords...
Eh oui, la publicité a infiltré mon
cerveau, même sans télé : consommer = avoir de l'argent = être
heureux.
Dur constat, mais je m'en doutais
depuis un moment, même si le fait d'être plongée dedans ne me
permette pas de le réaliser suffisamment pour pouvoir l'exprimer, et
encore moins pour pouvoir lutter. À moi maintenant de corriger cette
déviation.
Finalement, et malgré un passé
colonial mal assumé, j'ai gardé un assez agréable souvenir de
cette petite péninsule, et me dis après tout que j'aurais du y
passer plus de temps qu'à Hong Kong, temple de la consommation par
excellence, dont même la vieille ville contraste avec celui de sa
paisible voisine.
Terminal de ferry pour Macao, 15/11/09,
08h20 GMT+8
J'ai été interrompue hier par le
chauffeur fou furieux de la navette qui fait l'aller-retour entre
l'auberge et le centre ville, qui a pris un virage tellement
violemment que toutes mes affaires ont volé.
À l'arrivée à l'auberge, le
réceptionniste m'installe et me donne toutes les infos dont j'avais
besoin. Je me rends dans la cuisine pour mettre ma bouteille d'eau au
frais, et rencontre le petit groupe qui m'avait déjà aidée à
rassembler toutes mes affaires dans la navette. On fait connaissance,
et ils insistent pour que je dine avec eux. How nice! Au menu:
coquillages, saucisses, ailes de poulet, champignons, pousses de
soja, épis de maïs, etc, le tout au barbecue. Un délice! Twinkie,
Catherine, Sammy et Ronald sont 4 hong-kongais installés à l'autre
bout de la ville (Kowloon et les Nouveaux Territoires, nous sommes
sur l'Île de Hong-Kong.
Nous dinons, nous papotons beaucoup. Au
milieu du repas, je me demande si les Hong-kongais aussi mangent du
chien. Comment leur poser la question en évitant, le cas échéant,
que je trouve ça un peu... pas pour moi? Petit tour de passe-passe,
commence à voir pointer le « non », et fait en sorte
qu'ils ne fassent pas le rapprochement avec notre repas. Ouf! En fait
c'est illégal ici.
Ils m'expliquent ensuite qu'ils vivent
la rétrocession comme une indépendance. Non pas dans le sens où
ils ont été libérés par les Chinois, non. Dans le sens où les
Anglais sont partis, mais que les Chinois ne sont pas encore « trop »
là. (En effet, dans les accords de rétrocession, la Chine s'est
engagée à respecter les spécificités locales (notamment le
commerce et les investissements libres, presse indépendante, etc)
pendant 50 ans).
Ils me donnent également des milliers
de conseils bien utiles (comment me rendre à Macao, où acheter un
appareil photo, quels coins craignent vraiment, les endroits capitaux
à visiter, etc)
Me voilà donc dans le ferry pour
Macao. Je suis la seule occidentale (eh oui, ici c'est moi
l'occidentale). Ronald et Sammy m'avaient prévenue : Macao est la
destination de weekend de beaucoup de Hong-kongais, qui partent
tenter leur chance, et à défaut se changer les idées dans le
Monaco régional. Le guide du Routard déconseillait d'ailleurs de
s'y rendre le weekend. Mais que serait une Sofia sans un soupçon de
rébellion? :)
Arrivée à Hong-Kong assez fidèle à
mes attentes, et aux différents guides touristiques.
La grippe A est prise très au sérieux
ici (en même temps, la dernière fois que j'ai atterri en France
était en juillet, et on n'en faisait pas encore autant); un
questionnaire portant sur la santé des passagers est distribué à
bord de l'avion, et ensuite recueilli par des équipes du ministère
de la santé local. Par ailleurs, tout le personnel de l'aéroport
porte un masque.
Une fois passé ce checkpoint, j'arrive
au contrôle de l'immigration. Le mec retourne mon passeport marocain
dans tous les sens, ne sachant pas comment le prendre. Il voit ma
photo, et me pose une question que j'attendais mais pas aussi
franchement : « Pourquoi vous êtes-vous coupé les cheveux? »
Euh... J'ai voulu lui épargner les vraies raisons, qui auraient pu
me renvoyer au contrôle santé (Mes cheveux ont pris cher suite à
mon opération et à tous les traitements qui en découlent), et lui
affirme que c'était simplement pour changer de look. Il me pose des
milliers de questions, avant que je ne constate que les touristes
européens aux autres guichets passaient en un clin d'œil. Je lui
présente alors mon titre de séjour français, il en vérifie
l'authenticité, et, comme par enchantement, BAM!, coup de tampon sur
mon passeport : « Have a nice journey in Hong-Kong Ma'am ».
Le complexe de l'Européen n'est apparemment pas l'apanage des
anciennes colonies françaises!
Autre information vérifiée : tout est
fait pour vous faire consommer. En effet, à l'aéroport, la clarté
et l'évidence des signalisations pour les transports permettant de
rejoindre les autres îles ou le Hong-Kong continental, sont
proportionnelles à leur prix : limousine, voiture avec chauffeur,
taxi, train, visite guidée en bus, etc. Mais où sont donc les bus
publics? Et bien pour les atteindre, il faut passer devant les
comptoirs de tous les autres moyens de transport, une sorte de
labyrinthe, et ignorer ou décliner les « Miss, Miss! »
hélés dans tous les sens par leurs représentants. Je souris en me
disant que c'est comme ça que doivent se sentir les touristes qui
arrivent au Maroc, avec tous les chauffeurs de taxis blancs qui se
jettent sur eux.
Je finis par trouver le A11, que je
dois prendre jusqu'au Sheung Wan Shun Tak Center, sur l'île de
Hong-Kong, centrale de bus, mais également de ferries, notamment
pour Macao.
Sur le trajet, je découvre les
premiers aspects de la ville : tout est vertical, condensé, et haut,
et pourtant, on voit des grues à tous les horizons. Je me demande où
ils trouvent encore la place pour construire [...]
Je ne sais pas si j'ai envie de dire
"enfin" ou "déjà".
Ces 10 derniers jours
ont été assez fous et déraisonnables. Un voyage décidé sur un
coup de tête, une to do list digne d'un ministre (ministre au sens
théorique du terme), et un rythme intense et saccadé à la fois,
mêlant euphorie, peur de ne pas avoir le temps de tout faire avant
le départ, et diverses angoisses, majoritairement transférées par
les autres d'ailleurs (mais je sais, avec le recul, que ça part d'un
bon sentiment) : « Le visa pour Singapour est quasi-impossible
à obtenir; tu devrais pas emmener ton PC, c'est dangereux; ne prends
aucun argent liquide sur toi; fais-toi vacciner contre la grippe A;
et le must : Tu voles un vendredi 13??? »
Moi qui suis de nature anxieuse, je
n'avais pas besoin de ça, même si, encore une fois, j'apprécie le
sentiment derrière :)
Heureusement, d'autres, parfois les
mêmes d'ailleurs, m'ont aidée à garder mon sang froid, voire à
faire redescendre ma pression artérielle par moments...
Quoi qu'il en soit, le résultat
attendu est là : je suis dans mon avion, à l'heure, en règle, sans
avoir laissé aucun dossier urgent derrière moi, et c'est
l'essentiel!
8 semaines en Asie, un point de départ, une infinité de points de chutes...
Quoi de mieux qu'une période de répit entre 2 boulots pour prendre son sac à dos et partir à l'aventure? Ainsi s'est décidé ce petit voyage, que je vais tenter de narrer et d'illustrer le plus assidument possible via ce blog...